GRISSMER YVONNE 1925 –  1944

Elle est née le 18 mars 1925 à Strasbourg (67) et grandit dans le village de Bischheim(67) où habitent ses parents.

Elle est la fille de Charles Grissmer et de Marie Kaufeld son épouse.

Célibataire, elle vit chez ses parents au 10 rue de l’étoile à Bischheim.

Après l’annexion de l’Alsace par les nazis elle doit changer de prénom (Yvonne étant « trop français »)  par celui d’Erika ( dans le cadre de la germanisation forcée de la population alsacienne, tous les prénoms français qui n’avaient pas d’équivalence en allemand devaient obligatoirement être remplacés par un prénom germanique issu d’une liste de prénoms pré-sélectionnés).

Elles est incorporée de force dans la marine allemande « Kriegsmarine » le 5 mai 1944 et doit se rendre, comme « Marinehelferin » (aide-marinière) à Kiel qui est un grand port maritime sur les bords de la mer Baltique.

Le  20 novembre 1944 elle donne pour la dernière fois de ses nouvelles à ses parents, de Osehhof-Gottenhafen en Pologne et non en Allemagne comme indiqué dans le dossier (Gotenhafen = aujourd’hui ville de Gdynia en Pologne).

Bischheim…Kiel…Gotenhafen…

C’est la date du 20 novembre 1944  qui est retenue dans son acte de décès…elle avait 19 ans.

Elle a très certainement sombré avec le navire sur lequel elle se trouvait (à cette période de nombreux navires allemands sont coulés par l’aviation alliés ou les sous-marins russes le long des côtes de la mer du Nord et Baltique).

En date du 29 mars 1960 dans une déposition faite à la gendarmerie de Schiltigheim (dans le cadre de l’étude des dossiers des incorporés de force par l ministère des anciens combattants) son père déclare :

« Ma fille Grissmer Yvonne a été incorporée de force dans la marine allemande en 1944. Depuis la date de son départ, elle n’est pas reparue à notre domicile. Sa dernière lettre en date du 20 novembre 1944 était de Osehhof-Gottenhafen en Allemagne (Gotenhafen = aujourd’hui ville de Gdynia en Pologne . Je sais que mon enfant se trouvait sur un bateau. Elle se trouvait avec une jeune fille de Strasbourg-Robertsau dont j’ignore le nom et l’adresse. C’est tout ce que je puis vous dire concernant ma fille ».

Le même jour la gendarmerie interroge deux autres témoins :

Joseph Lehmann, 50 ans , peintre qui habite également 10 rue de l’étoile à Bischheim et il déclare :

« Grissmer Yvonne, était une voisine. En 1944 elle a été incorporée de force dans l’armée allemande. Je ne sais pas ce qu’elle est devenue. De toute façon, elle n’est pas reparue au domicile paternel. Je puis certifier que cette jeune fille n’était pas volontaire pour servir la cause allemande et que si elle est partie c’est bien sous l’emprise de la contrainte ».

Charles Erb, 54 ans, secrétaire de mairie de Bischheim qui déclare :

« J’ai bien connu la jeune Grissmer Yvonne, qui est née le 18 mars 1925 à Strasbourg. Elle a été incorporée de force dans la marine allemande en 1944. Elle n’est jamais reparue au domicile de ses parents qui demeurent dans notre commune, au 10 rue de l’étoile. Cette famille avait toujours des sentiments francophiles » .

Par jugement du 7 juillet 1960 du tribunal de Strasbourg, il lui est décernée la mention « MORT POUR LA FRANCE ».

Merci à Claude Herold pour ses recherches et le partage des informations et documents trouvés.

Source : dossier AC21P219193/323312AL du Service Historique de la Défense de Caen – Mémoire des Hommes.

Sanitäter de la 716.Infanterie-Division

Ce sous-officier affilié à une Sanitätskompanie(Compagnie sanitaire) a la charge de fournir les premiers soins à ses camarades sur le champ de bataille.

Il est vêtu d’une chasuble et d’un brassard à croix rouge permettant d’identifier son rôle de soignant auprès des soldats de sa division et des forces adverses.

Il emporte avec lui deux gourdes de 1 litre à destination des blessés, ainsi que deux sacoches en cuir au ceinturon et une caisse métallique pour transporter son matériel de premier secours.

Ainsi qu’un brancard pour transporter les soldats les plus grièvement blessés.

Comme dans chaque division de la Wehrmacht, l’organisation des unités médicales est essentielle pour assurer le soutien sanitaire aux troupes en campagne.

Ces unités étaient responsables des premiers soins, de l’évacuation des blessés et de leur traitement initial avant un éventuel transfert vers des hôpitaux de campagne plus éloignés.

L’Organisation générale de ces unités sanitaires est la suivante :

1. Sanitätsdienst (Service de santé divisionnaire) :

Chaque division de la Wehrmacht dispose d’un Sanitätsdienst, dirigé par un Divisionsarzt (médecin-chef de division), un officier supérieur du service de santé.

2. Sanitätskompanie (Compagnie sanitaire) :

Chaque division a généralement deux Sanitätskompanien, qui sont des unités de soins avancées chargées de :

Fournir les premiers secours aux blessés sur le champ de bataille.

Mettre en place des postes de secours avancés (Hauptverbandplätze) situés à quelques kilomètres du front.

Organiser l’évacuation des blessés vers des structures médicales arrière.

3. Krankenkraftwagenzüge (Sections d’ambulances) :

Ces unités motorisées sont équipées de Krankenkraftwagen (ambulances) pour transporter les blessés des postes de secours vers les hôpitaux de campagne ou les points de transfert ferroviaires.

4. Feldlazarett (Hôpital de campagne) :

Situé plus en arrière du front par sécurité, il sert à traiter les blessés graves et les stabiliser avant leur transfert vers un hôpital permanent.

Un Feldlazarett peut être organisé sous tentes ou dans des bâtiments réquisitionnés.

5. Krankensammelstellen (Points de rassemblement des blessés) :

Zones où les blessés légers peuvent être soignés rapidement et éventuellement renvoyés en service, tandis que les cas graves sont envoyés vers l’arrière.

6. Veterinärdienst (Service vétérinaire) :

Chargé du soin des chevaux qui sont indispensables au transport du matériel, vivres, muntions… dans les unités d’infanterie et d’artillerie de l’armée allemande.

Comprend un Tierarzt (vétérinaire militaire) et un Pferdelazarett (hôpital pour chevaux).

Soutien médical complémentaire :

En plus des unités sanitaires divisionnaires, des hôpitaux d’évacuation (Evakuierungslazarette) et des hôpitaux militaires permanents (Kriegslazarette) existent en zone arrière et sont souvent reliés aux réseaux ferroviaires pour l’évacuation des blessés vers l’Allemagne.

Cette structure permet à la Wehrmacht de gérer efficacement les soins de ses soldats blessés tout en maintenant son effort de guerre.

Sources :

  « Handbook on German Military Forces » (TM-E 30-451, publié par l’US War Department en 1945) – Ce manuel détaillé décrit l’organisation et la structure des unités médicales allemandes pendant la Seconde Guerre mondiale.

  « Die deutsche Wehrmacht 1939–1945 » de Wolfgang Fleischer – Une analyse de l’organisation et du fonctionnement des différentes branches de la Wehrmacht, y compris les services médicaux.

  « Sanitätsdienst der Wehrmacht » – Divers documents et archives disponibles dans les archives militaires allemandes ou via des sites spécialisés sur l’histoire militaire comme Lexikon der Wehrmacht (www.lexikon-der-wehrmacht.de).

 « Kranken- und Verwundetentransport im Zweiten Weltkrieg«  de Karl-Heinz Parschalk – Une étude approfondie sur le transport des blessés dans l’armée allemande.

Schwere Panzerjäger-Abteilung 654

Vétéran allemand du front russe (combat depuis 1941), au grade de Lieutenant :

chef de char appartenant à la Schwere Panzerjäger-Abteilung 654, unité blindée équipée de chasseurs de chars de 45 tonnes « Jagdpanther » Sd.Kfz.173″ – Alsace, novembre 1944.

Opération dans la Forêt de la Hardt, Jagdpanther du Hauptmann Lüders -source the combat History of SPA 654 de karlheinz Münch.

Il porte une tenue en drap entièrement noire, pratique pour ces hommes qui doivent entrer, se mouvoir à l’intérieur et sortir de l’espace très cloisonné du panzer, parfois très rapidement quand la situation l’exige.

Un véhicule blindé de ce type est inévitablement huileux, sale et plus ou moins poussiéreux, expliquant aisément le choix de la couleur noire pour cette tenue.

La veste croisée (Feldjack) porte comme attributs des pattes d’épaules bordées de rose (couleur d’arme des Panzertruppen allemandes) et des pattes de collet, elles aussi aux couleurs de l’arme avec la fameuse tête de mort (cette tête de mort est directement inspirée du Husaren-Regiment Nr.5 « von Ruesch » de Frédéric le Grand datant du milieu du 18 siècle).

Rubans de décorations et autres distinctions sont épinglées sur le coté gauche du blouson :

– Bandspange EK2 und KVK(Kriegsverdienstkreuz) mit schwerter.

– Croix de Fer 1ère Classe (EKI)

– Panzerkampfabzeichen « argent » (insigne de combats des blindés).

– Verwundetenabzeichen « argent » (insigne des blessés pour avoir été blessé 3 ou 4 fois au combat ou gravement atteint).

Le pantalon (Feldhose) est quand à lui de la même texture que la veste, avec des lacets de serrage en bas des jambes.

Le calot porté par cet officier est orné sur tout le pourtour du rabat d’un petit galon d’argent.

Un pistolet du modèle P38 logé dans son étui en cuir est porté sur le ceinturon avec boucle dite à ardillons.

Les écouteurs radio et laryngophone font parties des équipements de bord.

3 décembre 1944 secteur du pont-du-Bouc près de Rixheim- source the combat History of SPA 654 de karlheinz Münch.
Jagdpanther n°131 – source the combat History of SPA 654 de karlheinz Münch.

57 mm M1 Anti-Tank Gun

source : internet WW2 US Archives.

Edgar Louis Jackson 1918 – 1998

Edgar Louis Jackson – photo Jackson family.

Edgar Louis was born on December 7, 1918 in Hopkins County, Kentucky.

His first name was Edgar, like his father’s, and to avoid confusion everyone called him Louis.

He completed high school.

His main hobby was hunting squirrels, doves, rabbits and quail.

Before the war, he was a farmer in Slaughters, Ky. USA.

His service records, like millions of others, were destroyed in a building fire at the National Personnel Records Center (NPRC) in St. Louis, Missouri, on July 12, 1973. 

He didn’t talk much about what he’d accomplished during the war, but his son Bobby knows that after being drafted he was first sent to the Pacific to protect airstrips in Alaska, in the Aleutian Islands.

His tissue patch from Alaskan Defense Command (ADC) – photo Jackson family.

He later joined the 75th IDUS (we don’t know when) and was sent to fight in Europe.

« Route of the Fighting 75th Division – december 1944 to may 1945 ».

His whereabouts during this period are not known (Normandy? Ardennes? Alsace? Germany?).

He ended the war as Staff Sergeant.

Honor roll of Edgar Louis Jackson- photo Jackson family.

After 52 months in different theaters of operation, he was demobilized and returned to his native Kentucky to pursue his life as a farmer.

Before the war, he had a relationship with Mary Lee Grisham.  After the end of the war and his return to the United States, they were married on October 6, 1945.

Mary Lee – photo Jackson family.

Mary Lee took part in the war effort, working in the « Sunbeam Munitions Factory » (Chrysler’s Evansville auto-assembly plant converted to ammunition production) in Evansville, Indiana.

The couple had the joy of enlarging their family with the birth of Kitty June Jackson in December 1946 and Bobby Gene Jackson in June 1952.

Louis and Mary Lee with all 3 grandchildren – photo Jackson family.

Edgar Louis Jackson died on June 8, 1998 at the age of 80, after surviving for several years the removal of a lung due to tobacco cancer.

He is buried at the New Salem Methodist Church Cemetery in Jewel City, Hopkins County, Kentucky.

Mary Lee Grisham Jackson, his wife, was born on August 23, 1921 in Webster County, Kentucky.

Mary Lee watched the Kentucky basketball games on TV and she did cheer for the wildcats and boo the opponents. She participated with a group of Methodist women at Onton Methodist church who met weekly and made quilts for people for the money given to the church.

At 99 bd party with quilters cake – photo Jackson family.

She lived in her home (which she and Edgar had built after the war) until the last two months of her life, when she moved into a nursing home.

Right to left : Kitty Jackson Simpson, Bobby Jackson, Carole Ramsey Jackson (Bobby’s spouse), Eric Simpson (Kitty’s spouse) – photo Jackson family.

She died on September 15, 2022 at the age of 101 in Madisonville, Hopkins County, Kentucky.

After her death, her son Bobby and his sister Kitty, while cleaning out their late parents’ house, found in a cedar chest a packet of love letters that their father Edgar had sent to Mary Lee during the Second World War, and which she had treasured.

Thank you Edgar and Mary Lee for your dedication and contribution to the liberation of countries under the Nazi domination…we won’t forget you!

Mary Lee & Louis – photo Jackson family.
Louis and Mary Lee in 1988 – photo Jackson family.

Marcel MEJEAN 1924 – 2025

Marcel Mejean en 1945 – coll. M. Mejean.

Marcel est né le 18 janvier 1924 au 4 rue Cardinal Lavigerie situé au centre-ville de Sétif en Algérie.

Marcel avec 2 de ses soeurs Paulette et Raymonde – coll. M.Mejean.

Il grandi au milieu d’une famille nombreuse :  il a 3 frères (Jean, Lucien et Fernand tué en 1940) et 3 sœurs (Raymonde, Paulette et Suzanne).

Sa maman s’occupe de ses 7 enfants et son père est employé au PTT (il a été mobilisé et a combattu pendant la première guerre mondiale au sein du 1er Régiment de Zouaves).

Mejean Raymond, père de marcel – coll. M. Mejean.

Marcel vit une enfance heureuse. Il quitte l’école à l’âge de 12 ans après le certificat d’étude, pour apprendre le métier de mécanicien dans un garage Renault.

Le garage Renault « Les frères Collet » où Marcel a fait son apprentissage – coll. M. Mejean.

Sportif, il pratique le football (avec une balle faite de chiffons) derrière les remparts de la ville qui était le terrain de jeux préféré de lui et ses copains, de toutes origines et religions. L’un de ses meilleurs amis est Arribi Mokhtar(1924-1989) qui deviendra footballeur professionnel à Sète dans les années 50 et qui a même joué un match avec l’équipe de France (il entrainera également l’équipe d’Algérie par la suite).

Arribi Mokhtar(1924-1989) – coll M Mejean.

Il pratique également la boxe avec ses copains et souvent cela se termine par une ribambelle d’injures « comme seulement les Pieds-Noirs en connaissent » dixit Marcel Méjean.

Aves ces petits copains catholiques il est enfant de Chœur et aime particulièrement servir lors des mariages ou enterrement car souvent ils reçoivent un « bakchich » de quelques centimes ou francs qui leur permet d’aller acheter chez Saïd un petit pain avec une merguez.

Marcel et ses copains au jardin d’Orléans à Sétif – coll. M. Mejean.

La vie était belle mais cela ne va pas durer et un jour d’août 1939, finis les jeux d’enfants, la guerre approche à grand pas et devient de plus en plus réelle…Jeannot, Memé, Yvon, Moktar, les frères Levé, tous les petits camarades de Marcel se dispersent…ils ont alors entre 16 et 17 ans. Les 2 frères ainés de Marcel sont mobilisés dont Fernand qui est Mort pour la France le 15 mars 1941.

Tombe de Fernand Mejean Mort pour la France le 15 mars 1941 – coll M.Mejean.

A 16 ans, trop jeune pour s’engager dans l’armée, Marcel décide de servir la France (par esprit de vengeance et de patriotisme) en rejoignant les Compagnons de France qui fabriquent des paniers en osier. Puis il travaille sur la base aérienne de Blida.

Le 1er octobre 1942 Marcel s’engage au 13ème Régiment du train de Clermont-Ferrand car il veux découvrir la « mère Patrie » comme il l’appelle. Il est dirigé le 30 octobre sur Philippeville où il loge à la caserne de France avant d’embarquer le 7 novembre et de quitter le port à 17h. Une fois au large, le navire doit faire demi-tour lorsqu’il fait face à l’armada américaine qui se dirige sur l’Afrique du Nord (débarquement « Torch » du 8/11/1942).

De retour à Sétif, Marcel s’engage alors au 7ème Régiment de Tirailleurs Algériens (7ème RTA) qui stationne dans sa ville natale.

Insigne du 7ème RTA – – Historique du 7ème RTA imprimerie nationale de Trèves 1948.

Après 1 mois de classe et 1 mois de peloton pour être caporal, Marcel est dans les 5 premiers et est désigné comme chef d’une pièce anti-char (37mm) ainsi que pour partir en Tunisie. Le 3 janvier 1943 Marcel et son Bataillon doivent colmater une brèche dans le dispositif français. Il reçoit son baptême du feu face à l’Afrika Corps du général Rommel avec une trentaine de Chars qui avaient forcés la passe du Djebel El-Hasureb. En mai 1943 à la fin de la campagne de Tunisie, Marcel rentre à Sétif pour fêter cette première victoire.

Carte des opérations de la campagne de Tunisie du 17 nov. 1942 au 13 mai 1943 – Historique du 7ème RTA imprimerie nationale de Trèves 1948.

Après quelques jours de repos Marcel et ses camarades sont entièrement rééquipés par les américains et ils se retrouvent en Oranie pour suivre un entrainement très dur  et sélectif (combat/débarquement/sport…). Sa compagnie anti-char est à présent équipée de canon  AT-57mm US.

Convoi avec un camion tractant un canon anti-chars de 57mm AT-57 gun – Historique du 7ème RTA imprimerie nationale de Trèves 1948.

Début décembre 1943 le 7ème RTA quitte la région d’Oran pour rallier en camion Bizerte (Tunisie) le 18 décembre 1943…le convoi fait 60 kms de long. La mère de Marcel vient le voir avant son embarquement le 20…ils ne le savent pas encore mais ils ne se reverront que dans 5 ans. Le 23 décembre, après une traversée difficile, Marcel aperçoit le Vésuve et il débarque à Bagnoli près de Naples.

Le 7ème RTA (au sein de la 3ème DIA) participe avec le Corps Expéditionnaire Français (CEF) du général Juin à la campagne victorieuse d’Italie de Naples à Sienne. Marcel Méjean fait toute la campagne d’Italie (Monte Cassino, Garigliano, ligne Gustave, ligne Dora…).

Secteur de Valentano – – Historique du 7ème RTA imprimerie nationale de Trèves 1948.

Le 14 juin 1944 à Valentano, Marcel Mejean étrenne ses galons de sergent.

AT-57mm Gun – MMCPC.

Il met avec ses hommes , son canon de 57mm en batterie à proximité d’un carrefour, quand soudain un panzer IV arrive devant  eux et ouvre immédiatement le feu avec sa mitrailleuse de bord. Marcel ordonne de suite à son tireur de faire feu. L’obus perforant transperce la tourelle et tue 3 de ses occupants.   

 

Carte des opérations du 11 au 16 juin 1943 dans le secteur de Valentano où Marcel obtient sa citation à l’ordre de la Brigade – Historique du 7ème RTA imprimerie nationale de Trèves 1948.

Pour ce fait d’arme Marcel Mejean obtient une première citation à l’ordre de la Brigade :

« Sous-officier, chef de pièce anti-chars. Le 14.6.1944 près de Valentano a stoppé un char allemand attaquant une résistance à la mitrailleuse, a fait deux prisonniers ».

Après la prise de Rome le 7ème RTA poursuit son avancée jusqu’à Sienne où il défile devant le général Juin.

Défilé de la 3ème DIA du 4 juillet1943 à Sienne – Historique du 7ème RTA imprimerie nationale de Trèves 1948.

Marcel se souvient d’une campagne victorieuse, mais qui fut l’une des plus pénibles en raison d’un hiver très rude, du manque de repos, des nombreuses pertes et des combats incessants : « je fus de tous ces combats : de la misère héroïque de Tunisie aux heures de gloires de Marseille, en passant par le terrible hiver italien, et les sanglants combats du printemps 1944, qui ouvrent aux alliés la route de Rome et les portes de la Toscane ».

Après quelques jours de repos Marcel et ses camarades traversent toute l’Italie pour se retrouver à Tarente et préparer un futur débarquement sur les plages du sud de la France…sans le savoir.

« A Tarente avant l’embarquement pour Saint-Tropez en août 1945. Debout de gauche à droite : PLOUGOULM – LEVRAT – GALEA – DUSSAIX. Assis de gauche à droite : GAILLARD – MEJEAN – Adjudant ? – coll. M. Mejean.

Le 8 août 1944, Marcel embarque avec une partie du 7ème RTA sur le navire anglais « Worcestershire ».

HMS Worcestershire (F 29) – source internet.

Son convoi emprunte « la route » la plus longue qui longe les côtes de la Sicile, puis cap sur la Tunisie, lle cap Bon avant de s’arrêter devant Bizerte pour repiquer vers l’Algérie. Marcel et ses camarades pensent rentrer à Sétif mais tout un coup le convoi met cap plein Nord…cette fois tous ont compris : l’opération Anvil-Dragoon est lancée.

Illustration des navires qui approchent des plages de Provence – Historique du 7ème RTA imprimerie nationale de Trèves 1948.

A la vue des côtes françaises une voix s’élève à bord du navire de Marcel : « nous voici en France ! » et aussitôt tous les soldats chantent la marseillaise les larmes aux yeux. Une minute plus tard une vague de chasseurs-bombardiers allemands surgit dans le ciel et attaque la rade de Saint-Tropez mais elle est très vite dispersée par la puissante DCA du convoi.

Illustration du débarquement des soldats du 7ème RTA – Historique du 7ème RTA imprimerie nationale de Trèves 1948.

Marcel débarque à Sylvabelle dans la baie de Cavalaire.

Carte du débarquement de Provence, Marcel débarque sur la plage de Sylvabelle dans la baie de Cavalaire – source internet.

A l’entrée de Saint Tropez, sur la plage de la Foux, il découvre 80 morts et blessés et parmi eux un bon camarade de Borj-Bou-Arridj, Aimé Seilles. C’est la première fois que Marcel pose ses pieds sur le sol métropolitain et il n’est pas le seul car 80% des soldats du 7ème RTA sont des Pieds-Noirs, Corse ou Algériens de souche.

Carte de la progression du 7ème RTA vers Marseille – Historique du 7ème RTA imprimerie nationale de Trèves 1948.

Le 20 août commence les combats pour la libération de Marseille.

Arrivée des soldats du 7ème RTA dans la banlieue Marseillaise – Historique du 7ème RTA imprimerie nationale de Trèves 1948.

Le 22, Marcel fait partie d’un groupe du 7ème RTA qui remonte le boulevard de la Madeleine. En entrant dans la ville la foule grossit de minute en minute, les femmes sautent aux cous des soldats.

La liesse dans les rues de Marseille – Historique du 7ème RTA imprimerie nationale de Trèves 1948.

Cette liesse populaire est gravée à jamais dans la mémoire de Marcel. L’acte de reddition allemand est signé le 28, et le lendemain le 7ème RTA défile en tête des troupes françaises le long de l’Avenue de la République, du vieux port et de la Cannebière. Ces combats coutent  la vie à 80 tirailleurs du régiment.

Le 7 septembre Marcel et son régiment quitte Marseille (« sans regret car cette ville est envahie de faux résistants, agitée par les trafics et règlements de comptes ») pour filer vers les Vosges et l’Alsace. En traversant Grenoble Marcel remet à un inconnu (qui se trouve au bord du trottoir pour les regarder passer) une carte destinée à sa sœur qui habite la ville et qu’il n’a pas vue depuis 6 ans (sans le savoir il était à 20m de chez elle).

Puis, c’est le Doubs, les Vosges, la vallée de la Moselotte et l’Alsace…

Novembre 1944, Saulxure sur Moselotte, « Mon chauffeur de dodge, un pied noir de Bougie » – coll. M. Mejean.

En novembre 44 les combats sont intenses et c’est en montant un poste avancé dans le secteur de La Bresse que Marcel apprend que son meilleur camarade ; Modica surnommé Tintin est mort, tué par une grenade. Cela lui cause une grande peine car ils étaient inséparables.

Photo de groupe avec Marcel et ses camarades à Saulxure sur Moselotte début novembre 1944 – coll. M. Mejean.

Marcel passe son premier noël sur le sol de France à Kruth; le premier libéré par le 7ème RTA en Alsace.

Cartes des opérations dans le secteur de Kruth – Historique du 7ème RTA imprimerie nationale de Trèves 1948.

Un repas amélioré est servi avec une double ration de vin, sans parler du schnaps à volonté distribué gracieusement par les gens du village…sauf pour les hommes qui montent la garde !

Marcel et ses camarades à Kruth en décembre 1944 – coll. M. Mejean.

Du 1 au 5 janvier 1945, Marcel à la chance de bénéficier d’une permission qu’il passe à Grenoble pour voir sa sœur. Il rejoint son unité à Saulxures et se retrouve quelques jours plus tard à Krautergersheim pour défendre Strasbourg d’un retour des forces allemandes. Il fait un froid de canard (-12 degrés).

Le 7ème RTA arrive en Alsace – Historique du 7ème RTA imprimerie nationale de Trèves 1948.

Le 18 janvier 1945, jour de son 21ème anniversaire il entre dans Erstein par la rue de l’hôpital.

Erstein le 18 janvier 1945 au 5 rue de l’hôpital – coll. M. Mejean.

C’est en faisant une pause pour repérer le meilleur emplacement pour poster son canon qu’il repère au numéro 9 de cette même rue une jeune fille (qui deviendra sa marraine de guerre) toute emmitouflée dans un fichu de laine, avec un pot de lait…ce n’est pas le petit chaperon rouge mais simplement la future épouse de Marcel (ils se marient 4 années plus tard).

Marie-Louise Steiner future épouse Mejean – coll. M. Mejean.

NB : son épouse est arrêté par la Gestapo le 8 décembre 1943 et envoyée le 22 au camp de redressement de Schirmeck (suite à une dénonciation) pour avoir aidé des prisonniers dans l’usine d’armement de Rhinau où elle travaille. Elle en sort sur une civière et est ramenée à l’hôpital de Erstein, le 30 mars 1944, alors qu’elle ne pèse plus que 37 kgs.

Extrait d’un article de presse concernant l’histoire de l’épouse de Marcel lors de l’annexion allemande – coll. M. Mejean.

 Le 22 janvier, suite à la contre-offensive allemande il se retrouve dans le secteur de Gambsheim-Kilstett où les combats font rage. En février 45, Marcel est en repos à Truchtersheim.

Le 7ème RTA dans le secteur de Gambsheim-Kilstett – – Historique du 7ème RTA imprimerie nationale de Trèves 1948.

Il est nommé sergent-chef en mars 1945 et il est  affecté au 49ème RI (ex Corps Franc Pommiès), toujours au sein de la 3ème DIA.

Il franchit le Rhin le 2 avril 1945 à hauteur de Spire en Allemagne et débute ainsi sa campagne d’Allemagne.

Marcel Mejean obtient une nouvelle citation, à l’ordre du régiment, le 8 avril 1945 :

« Excellent Chef de groupe courageux et dévoué. Le 8 avril 1945 à Ditzingen, au cours d’une mise en batterie mouvementée, sous le feu ennemi, a réussi par son sang-froid à capturer un soldat ennemi ».

Campagne d’Allemagne du 49ème RI avec la 3ème DIA, de Spire à Stuttgart – carte extraite de la plaquette « le CFP 49ème RI ORA ».

Le prisonnier en question va livrer de précieuses informations concernant les défenses de la ville de Stuttgart qui sera définitivement prise le 22 avril 1945 au prix de nombreuses pertes (40 tués, 160 blessés et 10 disparus). Marcel occupe avec son groupe la gare centrale qui est encore en feu.

Marcel est revenu en 2012 à Stuttgart, avec son petit fils Jonathan, sur les lieux où cette photo avait été prise en avril 1945, au 23 Verastrasse avec MOLINO et son inséparable camarade FLEURET – coll. M. Mejean.

Après la fin de la guerre le 8 mai 1945, Marcel rentre à Sétif pour une permission bien méritée. Il se porte volontaire pour l’Indochine et doit retourner à Oberndoff en Allemagne pour rejoindre le 23ème Régiment d’Infanterie Colonial (23ème RIC).

En route vers Saïgon sur le « King-Point Victory » – coll. M. Mejean.

Le 4 décembre 1945 Marcel embarque à Marseille sur le navire « King-Point Victory » et arrive à Saïgon le 26 décembre (Marseille – port Saïd – Suez – Djibouti – Colombo – Singapour – Saïgon).

Marcel Mejean en Indochine au 23ème RIC – coll. M. Mejean.

Son « séjour » en Indochine dure 3 ans de 1945 à 1948.

Marcel en janvier 1946 à CHO-CU-CHI – coll. M. Mejean.

C’est le 15 janvier 1946, jour de la Saint Marcel, lors d’une attaque surprise de son poste avancée (9 soldats contre une cinquantaine) que Marcel se distingue à nouveau et qu’il est cité à l’ordre de la Brigade : « Chef de poste à Cho-cu-Chi, son poste étant attaqué par surprise par une cinquantaine de rebelles armés de fusils et de grenades, a fait preuve du plus grand sang-froid, a repoussé l’attaque, obligeant les rebelles à se retirer en laissant 5 morts sur le terrain ».

Dessin du poste de CHO-CU-CHI qui était la seule maison en dur du village, éloigné de 60kms du PC de la compagnie – coll. M. Mejean.
Citation de Marcel Mejean pour sa conduite au feu le 16 janvier 1946 – coll. M. Mejean.

Après 3 années de luttes incessantes Marcel embarque sur le « Félix Roussel » le 24 janvier 1948 pour arriver en France le 22 février 1948.

Le 16 avril 1949 il se marie avec Marie-Louis Steiner dit « Marlyse ». Ils ont la joie d’avoir 2 enfants : Serge en 1950 et Mario en 1952.

Marcel et Marlyse en 1952 su r le navire s/s « Hoggard d’Abidjan – coll. M. Mejean.

Marcel poursuit sa carrière militaire en Afrique et Haute-Volta de 1949 à 1952, puis le Mali de 1953 à 1955 et de 1958 à 1960.

Instruction aux jeunes recrues en Haute-Volta à BoBo.Dioulasso – coll. M. Mejean.

De1955 à 1958 il est en Algérie, où il obtint une nouvelle citation (à l’ordre de la Brigade) :

« L’adjudant-Chef Mejean Marcel, officier de renseignements du S/quartier Saint-Victor a , par son activité incessante, son dynamisme, des solides connaissances de la langue et du pays, largement contribué à maintenir le calme dans la région. Le 21 mars 1958 à Montebello (Algérie), a localisé une bande et a permis de détruire un groupe de cinq rebelles armés, auteurs de nombreuses exactions dans la mitidja ouest ».

Marcel avec son fidèle « Volf » (Montebello en 1957) – coll. M. Mejean.

« Le commandement a voulu me nommer officier mais j’ai refusé en disant qu’il vaut mieux rester un adjudant-chef vivant qu’un sous-lieutenant mort ! »

Il participe aux opérations de de Port-Saïd en 1956.

Photo du groupe de Marcel qui a participé à l’opération de Port Saïd en 1956 – coll. M. Mejean.

En 1958 il quitte l’Algérie, son pays natal, sa famille, sa maison en sachant qu’il n’y retournera plus.

Le Niger de 1958 à 1961 et le Cameroun en 1962.

Les Présidents du Sénégal(Mamadou-Dia) et du mali(Modibo-Keita) passent en revue le détachement du Lieutenant Bousquet et de l’adjudant-chef Mejean du 5ème RIAOM en juin 1959 – coll. M. Mejean.

Il est titulaire des décorations suivantes :

Chevalier de la Légion d’Honneur,

Médaille Militaire,

Ordre National du Mérite,

Croix de Guerre 1939-1945 avec 2 citations,

Croix des TOE avec 1 citation,

Croix de la Valeur Militaire avec 1 citation,

Croix des Engagés Volontaires,

Croix du Combattant 1939-1945,

Médaille coloniale avec agrafe Tunisie et Afrique,

Médailles commémoratives :

Italie, Guerre 1939-1945, Extrême-Orient, Algérie,

Grand prix humanitaire – médaille de Vermeil,

Médaille d’or de l’académie du dévouement national,

Médaille Rhin et Danube,

Médailles des victimes de guerre,

Mérite du combattant,

Médaille du Djebel,

Médaille du combattant moins de 20 ans,

Médaille combattants 1939-1945.

Les décorations de Marcel Mejean – coll. M. Mejean.

Marcel Méjean quitte définitivement l’armée en 1963 après 2940 jours de guerre (il a participé à 8 guerres) et revient avec sa famille à Erstein.

Le soleil lui manque et à partir de 1976 il s’installe avec sa famille à Grenoble puis Bandol pendant une douzaine d’années.

En 1988 il revient s’installer à Erstein pour voir grandir ses 3 petits enfants (et par la suite les 3 arrières petits enfants).

La « tribu Mejean » au grand complet – coll. M. Mejean.

Il exerce le métier de moniteur d’auto-école et pratique activement le judo où il enseigne de nombreuses années.

Marcel Mejean un retraité alerte – coll. M. Mejean.

Sa retraite est ponctuée de voyages avec son épouse, de croisière, il aime aussi chanter et est très investit dans le milieu associatif.

En 2014, il a le malheur de perdre sa très chère épouse après 65 ans de vie commune.

Il cuisine encore lui-même, fait la lessive et repasse ses chemises. Beaucoup d’amis viennent lui rendre visite, sa famille est très présente et il est fier de pouvoir encore participer à toutes les cérémonies commémoratives.

Le 18 janvier 2025 il fête ses 101 ans en présence de sa famille et de ses nombreux amis.

Janvier 2024, Marcel Mejean jeune centenaire – DNA Photo Jean-Paul Kaiser.

Marcel nous quitte le jeudi 20 février 2025 au matin après une brève hospitalisation, pour rejoindre pour l’éternité sa chère épouse et ses valeureux camarades du 7ème RTA.

Merci infiniment Monsieur MEJEAN pour votre engagement total au service de la France.

Au revoir Monsieur MEJEAN, et non adieu, car nous n’oublierons pas ce que nous vous devons et surtout…nous ne vous oublierons pas!!!

Marcel Mejean lors d’une cérémonie – coll. M. Mejean.

MERCI Monsieur Méjean pour votre engagement sans faille au service de la France !

En avril 2025 sera remis aux nouveaux récipiendaires de la nouvelle promotion de la 7ème Brigade Blindée l’insigne au nom de l’Adjudant-Chef Marcel Mejean en reconnaissance de la nation et de ses pairs pour son parcours exceptionnel.

Insigne de la Promotion ADC MEJEAN de la 7ème Brigade Blindée.

en complément :

Remise de la Legion d’Honneur à Marcel Mejean Par m. Collomp Président des anciens combattants – coll. M. Mejean.
En 1975, André Bord secrétaire d’Etat remet à Marcel Mejean l’Ordre National du Mérite – coll. M. Mejean.
Avant les championnats de boxe du Tonkin – coll. M. Mejean.
Dans la brousse avec son fidèle compagnon- coll. M. Mejean.
En compagnie du Roi de la Terre – coll. M. Mejean.
Escale à Casablanca en 1958 sur le paquebot S/S Djenne- coll. M. Mejean.
A Bamako(Soudan) avec l’équipe du 5ème RIAOM – coll. M. Mejean.
A pontoise avec l’équipe du 1er RMT- coll. M. Mejean.
Article des DNA – coll M.Mejean.
Article des DNA du 11 novembre 2009 – coll M.Mejean.

Couvre casque camouflé de type « Eclats » (Allemagne)

Cet effet de camouflage a été découvert dans le village de Houssen avec 2 « Windjacke » (coupe-vent) de Gebirgsjäger allemand.

Il y a une forte probabilité que ces effets appartenaient au soldats de l’Aufklärungs-Abteilung 67 de la 2.Gebrigs-Division.

Il s’agit d’une des premières composantes de la division de montagne à combattre dans la Poche de Colmar dès le 24 janvier 1945.

De par sa fonction de troupe de reconnaissance(Aufklärung en allemand), l’unité est envoyée au contact du 7th Infantry Regiment de la 3ème Division d’Infanterie américaine « Rock of the Marne » pour évaluer le dispositif des forces francos-américaines dans le secteur de Schoppenwihr-Houssen.

Compte tenue des pertes importantes lors des combats défensifs, l’unité sera amalgamée à d’autres groupes de la 2.Gebirgs-Divison pour poursuivre les combats le long du Rhin (Zone de repli de la 19.Armee) jusqu’à l’évacuation total de la division en Allemagne lors du franchissement du Rhin le 7 Février 1945.

Casque Modèle 1940 (Allemagne)

Ce casque camouflé en blanc par application de chaux a été trouvé dans le village de Durrenentzen après les combats du 30 et 31 janvier 1945 et conservé précieusement par un habitant.

Il est fort probable que ce casque a appartenu à un chasseur-alpin du Gebirgsjäger-Regiment 136, seule unité présente dans le village.

La présence du Gebirgsjäger-Regiment 136 à Durrenentzen est avéré dès le 30 janvier 1945.

Il s’agit d’éléments du Kampfguppe Nord « Vesper » ; nom du commandant du II./Geb.Jäg.Rgt.136 puis par intérim de l’ensemble du Gebirgsjäger-Regiment 136, le Major Vesper (auparavant il prend la direction des opérations à l’intérieur du village de Jebsheim à partir du 28 janvier 1945 et suite à la perte du village le 30 janvier se replie vers le sud en direction de Durrenentzen).

En l’absence de troupes françaises ou américaines positionnées dans le village de Durrenentzen le 30 janvier 1945, Il s’empresse d’organiser sa défense, renforcé avec 3 panzer V « Panther ».

Le village va être le théâtre de violents combats du 31 janvier au 1 février 1945 date de sa libération définitive, après les assauts répéter des commandos de France, du Bataillon de Choc et des blindés du 1er et 6ème Régiment de Chasseurs d’Afrique.

NB : Kampfguppe = groupe de combat

Gaston Louis GIFFEY 1922 – 2016

Il est né le 19 mars 1922 à Reims, au lendemain de la fin de la première guerre mondiale.

Son enfance est peuplée par les récits de sa famille et son père mobilisé en 1916, dont le frère prénommé Gaston a été tué dans la Somme. Sa mère et sa sœur sont mortes suite à l’éclatement d’un obus (le Grand-père se laisse mourir de chagrin).

Ses histoires marquent fortement Gaston qui voit naître en lui une farouche haine des allemands et qui s’imagine avec son âme d’enfant que tous les soldats allemands ont des « têtes carrés » (surnom qui leur était donné).

En 1939 aux prémisses de la seconde guerre mondiale, le jeune Gaston Giffey est persuadé que la France va rapidement gagner la guerre, comme l’annonce tous les journaux et toutes les affiches collées dans toutes les rues.

En 1940, au déclenchement des hostilités en France, il habite Fismes qui se trouve à la limite des départements de la Marne et de l’Aisne. La ville est bombardée à plusieurs reprises en raison de gare qui est un nœud ferroviaire  important. Quand une bombe touche le clocher de l’église Sainte Macre il est décidé d’évacuer toute la population de Fismes.

Gaston récupère les jambons qui restaient au dépôt de la charcuterie Tassin et part en train avec sa famille en direction du Mans où il va travailler dans une usine de fabrication de masques à gaz en tant que conducteur de camion. Suite à l’avancée fulgurante de l’armée allemande, sa famille décide de partir vers Toulouse où femmes et enfants sont hébergés tandis que les hommes dorment dans le train, avant de repartir vers Carcassonne puis Saint-Etienne.  (ils dorment sur le terrain de football). Les familles sont dispersées et celle de Gaston se retrouve à Saint Fortunat sur Eyrieux dans l’Ardèche. Gaston travaille chez le maire comme boucher. Il participe également à la cueillette des pêches et cerises. C’est à cet endroit qu’il apprend la triste nouvelle : la France a capitulée…Gaston est désespéré !

C’est en entendant l’appel du Général de Gaulle que l’espoir renait chez lui et qu’il n’a plus qu’un seul objectif qui est celui de rejoindre l’Angleterre pour poursuivre la lutte. A ses yeux Pétain, tant admiré, a trahi la France !

Malheureusement, malgré toute sa volonté il ne trouvera jamais le moyen d’atteindre les côtes anglaises alors qu’il avait déjà choisi le message à diffuser en cas d’arrivée outre-manche : « les carottes sont cuites ».

En août, la mort dans l’âme il est rapatrié avec sa famille, par camion, à Fimes. Arrivés chez eux le constat est désolant : 3 bombes sont tombées dans la propriété familiale, les cochons sont devenus sauvages, les vaches sont mortes faute de traite, la commune est détruite et occupée.

Pendant quelques temps Gaston va travailler à Courville dans un commerce de pain, d’épicerie et charcuterie avant de revenir à la charcuterie Tassin à Fismes.

Il rencontre à Reims par hasard un anglais habillé en officier allemand, ami de sa tante Nini, qui lui propose d’intégrer un réseau civil d’auto-défense avec l’adresse d’un correspondant qui tient le bazar de l’Hôtel de ville à Fismes. Plusieurs jeunes s’y rassemblent et décident d’agir face à l’occupant nazi. Ils récupèrent des armes et les cachent dans les carrières de pierre de Courville où les allemands n’allaient pas en raison de leur dangerosité. Leur action est majoritairement symbolique : sortir après le couvre-feu, arracher les affiches de propagande, brûler les drapeaux nazis…par contre une nuit ils attaquent une patrouille allemande composée de vieux soldats et leur volent leurs armes. Toutes ces actions ne recueillent pas toujours l’approbation de la population de Fismes car en représailles les allemands suppriment par exemple les tickets de rationnement de viande.

Le 1er janvier 1941 sur la place de l’hôtel de ville, des tankistes allemands engagent une bataille de boules de neige avec Gaston et ses amis, qui ajoutent des pierres au centre des boules : s’en suit une bagarre générale qui dégénère et voit l’intervention d’un escadron de la gendarmerie mobile de Reims qui arrête Gaston et deux de ses camarades (Charles et Jean). Enfermés à la Kommandantur les 3 comparses arrivent à s’enfuir dans la nuit après avoir frappé très fort (voir trop fort) la sentinelle…c’est le début d’un long périple qui ne s’achèvera qu’à la libération en mai 1945.

Avec un 4ème camarades (Théophile) ils prennent des vélos et rejoignent Reims où ils rencontrent un certain « Charbonnier » qui dit pouvoir les aider à rejoindre l’Angleterre par avion. Ils prennent avec lui le train en direction de la zone libre et arrivent à Chalon-sur-Saône.  Au café du tonneau d’or, « Charbonnier » leur demande de l’attendre car il doit rencontrer un membre de la filière d’évasion…ils ne le reverront jamais ???

C’est alors qu’un bon français leur propose de les aider à passer la ligne de démarcation. Malheureusement c’est un traître à la botte des allemands qui les livre purement et simplement ; seul Théophile arrive à se sauver. Gaston se souvient que pendant son interrogatoire il affirme vouloir rejoindre la zone libre et à l’interprète qui le nargue de lui promettre de lui envoyer une carte postale de Marseille. En « avant-première » Il déclare également que la France a perdu une bataille mais pas la guerre !  Jugés au château de Buxy dans la grande salle ornée de têtes de sangliers, ils sont condamnés tous les 3 à mort pour le meurtre de la sentinelle allemande de Fismes qui ne s’est jamais réveillée.

Ils doivent parcourir à pied, à coups de crosse dans le dos les 15 kilomètres qui séparent le château de Chalon-sur-Saône et ils sont incarcérés dans une cellule glaciale, sans nourriture du quartier allemand de la prison.

Dans la cours de la prison, après discussion avec d’autres détenus ils échafaudent des projets d’évasion mais au bout d’une semaine ils doivent partir pour l’Allemagne où la condamnation à mort doit être confirmée et exécutée. Ils se rendent à pied à la gare sous bonne escorte (de braves gens qui les croisent leur donnent du pain) et embarquent dans un wagon de voyageurs d’un train à destination de l’Allemagne. En gare de Dijon ils arrivent à descendre du train par la fenêtre du compartiment où ils étaient retenus et ils montent dans un autre train allant en sens inverse. Des agents Sncf les dissimulent sous des sacs dans le wagon postal. Arrivés à paris, les cheminots les aident à sortir de la gare en évitant les contrôles car ils n’ont plus aucun papier d’identité ni argent.

Un ancien patron de Gaston qui vit dans le 16ème arrondissement les aide en leur donnant du ravitaillement et en leur payant les billets de train à destination de Moulins. Arrivés à Moulins on leur conseille de ne se fier à personne mais d’aller se confesser…et c’est à Decize que le curé leur donne l’adresse d’une ferme proche de la ligne de démarcation en leur recommandant de ne se déplacer qu’à pied (surtout pas les transports en commun). Après s’être restaurés et avoir dormi dans cette ferme, au petit matin, une hache chacun sur l’épaule comme pour aller couper du bois ils se dirigent vers une saignée dans la forêt pour passer la ligne de démarcation. Les patrouilles allemandes passent à heure fixe et c’est donc sans grande difficulté que les 3 amis franchissent l’obstacle. Un régiment de l’armée d’armistice a hissé en haut d’un mat un drapeau qui leur indique la direction à prendre. Ils arrivent dans un village de l’Allier au nom prédestiné qui s’appelle « Chapeau ».  De là les militaires français les routent vers Neuilly-le -Real où les gendarmes leur donnent leur feuille de route individuelle et les billets de train pour rejoindre le camp militaire de Sainte Marthe à Marseille où ils pourront s’engager.

A la gare Saint Charles de Marseille une dame leur indique le chemin du camp et leur paye les billets du tram. Une fois arrivés sur place chacun fait une déclaration sur l’honneur concernant leur identité et leur âge. Charles d’origine italienne rejoint la Légion, alors que Gaston et Jean embarquent à bord du bateau « Gouverneur Général Chanzy » pour l’Algérie. Ils débarquent à Oran et découvrent à leur arrivée le café salé car la ville n’avait plus d’eau douce. Gaston ayant perdu son contrat d’engagement et il doit en signer un nouveau. Sa carrière militaire commence donc officiellement le 12 février 1941 dans l’Armée d’Armistice française (100 000 hommes).

Il rejoint comme unité le 66ème Régiment d’Artillerie d’Afrique (régiment hippomobile) à Eckmühl qui est un quartier d’Oran. Il est muté ensuite dans un groupe d’artillerie motorisé de la Légion Etrangère à Sidi Bel Abbès équipé de Citroën-Kégresse. Par la suite il est affecté dans l’artillerie de montagne au 68ème Régiment d’Artillerie d’Afrique (68 RAA) stationné à Tiemcen. Pour Gaston les premiers contacts avec les imposants mulets sont difficiles n’ayant pas de prédisposition à ce sujet. Gaston se rend rapidement compte que ces mulets sont loin d’être « bête » et font la différence entre ceux qui les traitent bien et ceux qui les maltraitent. C’est dans cette unité que Gaston effectue le peloton d’élève brigadier et celui de maréchal des logis. Les places sont chères, l’artillerie de montagne est très exigeante, il faut apprendre à souffrir sans jamais se plaindre et il y a une discipline de fer. N’ayant qu’une instruction scolaire primaire Gaston étudie la nuit dans les escaliers (seul endroit éclairé après l’extinction des feux) avec l’aide des camarades les plus instruits qui lui donnent des leçons car l’instruction général sur le tir d’artillerie demande des connaissances en mathématiques assez poussées.

Après 18 mois de service Gaston Giffey est maréchal des logis et il est chargé d’une batterie d’artillerie avec ses camarades Pérard, Lagarrigue et Vidal. Le capitaine Delseriès qui les aiment bien les a nommés chef de pièce à Sebdou.

Il y reçoit un petit cheval Barbe tout juste débourré qui répond au nom de Ramsès.

Gaston et son fidèle destrier « Ramsès » – collection Gaston Giffey.

Gaston se souvient de cette période « agréable » faite de longues sorties à cheval, de marches de 60 kms, d’exercices militaires, de manœuvres, de chasses aux sangliers où les gazelles sont épargnées et des petits déjeuners agrémentés de vin de Mascara et d’Olives.

Suite au débarquement du 8 novembre 1942, l’opération « Torch », et le débarquement des troupes américaines et anglaises en Afrique du Nord, les troupes françaises commencent à être équipées par les alliés. En Mai 1943 la général Giraud met sur pied le Bataillon d’assaut qui très vite prend le nom de Bataillon de Choc.

Après avoir été informé par son capitaine qu’un officier recrute pour un bataillon parachutiste, Gaston Giffey se porte volontaire et intègre le 23 juin 1943 le Bataillon de Choc stationné à Staouéli.

Insigne peint du Bataillon de Choc fabriqué en 1943 en Algérie – coll. H.Simorre.

Commence alors pour Gaston un long périple pour participer à la libération de la France…

L’entrainement ????

La Corse était occupée par les allemands et les italiens, mais l’Italie cesse les hostilités aux termes d’un armistice rendu public le 8 septembre 1943.

Embarqués dès le 13 septembre à bord du sous-marin Casabianca, Gaston est parmi les 109 hommes du bataillon de Choc qui débarquent à Ajaccio le lendemain 14-09-1943.

En juin 1944 c’est la prise de l’île d’Elbe.

En août 1944 le débarquement de Provence.

Le 10 septembre 1944, Talant aux portes de Dijon.

Octobre 1944, les durs combats de Haute-Saône et des Vosges (cote 820, Servance…).

Le 20 novembre 1944, l’entrée dans Belfort.

De décembre à Février 1945, la libération de l’Alsace, Masevaux, col du Hundsruck, Jebsheim, Durrenentzen.

Avril 45, franchissement du Rhin et la campagne d’Allemagne.

Le 8 mai 1945 à l’Arlberg en Autriche ;

Marcel HENON 1921 – 1996