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Adrien François MORINAUX 1921 – 1994

Portrait d’Adrien Morinaux, conducteur de char au 12ème Régiment de Chasseurs d’Afrique de la 2ème Division Blindée du Général Leclerc – coll. famille Morinaux.

Il est né le 1 mars 1921 à Berric dans le Morbihan.

Adrien est Issu d’une famille nombreuse  composée de 10 enfants dont le père est tailleur de pierre. 

Adrien avec toute sa famille – col. famille Morinaux.

Adrien quitte sa famille vers l’âge de 14 ans, puis suit une formation de chaudronnier.

Il travaille dans les années 30, dans les chantiers navals de St Nazaire.

Paquebot « Normandie » aux chantiers de Saint-Nazaire – source internet.

Il s’engage volontairement pour la durée de la guerre le 25 octobre 1939 à l’Intendance Militaire de Vannes au titre du 505ème Régiment de Chars de Combat (505ème RCC) qu’il rejoint le jour même. Il est nommé caporal par ordre n°12 du 27 mars 1940.

Adrien en novembre 1939 au 505ème RCC – col. famille Morinaux.

Après la défaite de la France en juin 1940 il est démobilisé le 23 août 1940 et rayé des contrôles de l’Armée d’active. Avec son frère Pierre, il franchit la ligne de démarcation et rejoint la zone libre ( nous n’avons pas d’autre information à ce sujet).

Parcours connu d’Adrien de 1921 à 1941 – carte klm127.

Le 23 janvier 1941 il embarque avec son frère Pierre à Marseille et arrive à Casablanca (Maroc) le 4 février 1941.

Le 1 mars 1941, jour de ses 20 ans, il se réengage (avec son frère Pierre) pour 3 ans à l’intendance Militaire de Rabat au Maroc au titre du 1er Régiment de Chasseurs d’Afrique (1 RCA). Son engagement est à effet rétroactif au 23er janvier 1941.

Adrien et un camarade sur une moto à Casablanca en juin 1941 – col. famille Morinaux.

Le 25 novembre 1941 il est affecté au 12ème G.A.C.A. (Groupe Autonome de Chasseurs d’Afrique) : il embarque à Casablanca le 12 décembre et débarque à Dakar au Sénégal le 19 décembre 1941. 

A Dakar c’est une longue préparation des hommes et du matériel au camp de Thiès ; dans la chaleur, la faim et le paludisme.

Adrien las d’attendre veut se battre contre l’occupant nazi et « déserte » pour tenter de rejoindre les soldats de la France Libre mais il est repris et mis aux arrêts (unité encore fidèle au régime de Vichy). Longtemps après son décès, son ancien geôlier, le DKL Vélut en fera le récit à son fils Bernard à l’occasion d’une commémoration à Ballon, Mezières sous Ponthouin. Commémoration des premiers engagements forts de la 2ème DB en Normandie. 

Périple d’Adrien de Marseille à Alger de 1941 à 1943 – carte klm127.

Son unité quitte Dakar le 12 janvier 1943 à bord des navires « Medie II » et « Jamaïque » et arrive à Casablanca où les Chasseurs logent quatre jours à la caserne « Malakoff », avant de réembarquer le 21 janvier vers Alger, avec une escale à Gibraltar. Ils arrivent sans encombre à Alger le 7 février 1943, après avoir subi une attaque nocturne par des vedettes et des sous-marins allemands au large de la ville de Mostaganem(Algérie). 

Le 15 février 1943 le 12ème GACA devient officiellement le 12ème Régiment de Chasseurs d’Afrique (12ème RCA) qui est sous le commandement du Lt-Colonel de Langlade.

Insigne du 12ème RCA avec sa devise « Audace n’est pas déraison » – source internet.

Il participe à la campagne de Tunisie (du 17/03/1943 au 13/05/1943) avec son unité.

Le 1er septembre 1943, le 12e R.C.A. est formé en Régiment de Chars type léger, à quatre escadrons de combat. Le lieutenant-colonel de Langlade en conserve le commandement. Il donne naissance par dédoublement au 12e Cuirassiers. Le 19 septembre, les deux Régiments sont désignés pour faire partie de la 2e Division Blindée. Ainsi le 12e Chasseurs passe sous les ordres du prestigieux général Leclerc, qui le conduira de victoire en victoire. (source JMO du 12ème RCA).

Le régiment passe la frontière algéro-marocaine le 30 septembre 1943 et sert au titre des réserves à compter du 23 janvier 1944. Stationnant en forêt de Témara, il continue son entraînement sur le nouveau matériel américain, chars légers et moyens.

Depuis décembre 1943, la 2e D.B. est articulée en trois groupements tactiques. L’un d’eux, le G.T.L, est commandé par le colonel de Langlade qui, conservant le commandement officiel du Régiment, est remplacé à sa tête par le Chef d’Escadrons Minjonnet.

Le 6 avril 1944, les permissions sont suspendues. Le général Leclerc convoque les Chefs de Corps et leur annonce que la Division doit embarquer à partir du 10. Le 12e R.C.A. fait mouvement sur Casablanca et embarque dans les L.S.T. américains. Après une traversée sans encombre, elle débarque à Swansea(Pays de Galle) le 22 avril 1944.

De mars 1943 à début août 1944 – carte klm127.

Le 1er juin, le Chef d’Escadrons Minjonnet prend officiellement le commandement du Régiment. Le 3 juillet, au cours d’une cérémonie qui se déroule dans le parc de Dalton Hall(Yorkshire – Angleterre), en présence de délégations d’officiers des Armées alliées, le général Kœnig, commandant les Forces Françaises de Grande-Bretagne, remet son étendard au 12e Chasseurs d’Afrique. Cet étendard lui est offert par l’association des Français de Grande-Bretagne. Pour la première fois, le Régiment porte le calot de tradition bleu ciel à fond jonquille, qui vient de lui être attribué. Cet étendard, fabriqué en Angleterre, est bien un emblème de guerre avec ses franges de soie, sa lance britannique, sa cravate très simple. Mais il porte déjà sur sa soie son premier titre de gloire, « Tunisie », auquel bien d’autres vont venir s’ajouter.

En Angleterre Adrien est à l’Escadron HR :

Dalton Hall, le 3 juillet 1944, photo de groupe de l’Escadron Hors Rang du 12ème RCA. Adrien est le troisième assis en partant de la gauche – col. famille Morinaux.

puis on le retrouve au 4ème escadron au Peloton de Miscault…

Adrien avec ses camarades du Peloton de Miscault du 4ème Escadron du 12èeme RCA – source : livre d’Arthur Kaiser « Un artisan Alsacien dans la Division Leclerc ».

A partir du 1er août vers minuit trente, le 12ème RCA commence à débarquer sur la plage normande d’UTAH BEACH et se regroupe à Vesly près de Saint-Germain-de-Varreville.

Le 12ème RCA entre dans la bataille le 10 août en direction d’Alençon. Le 12 nettoyage de la forêt d’Ecouves,Adrien est blessé accidentellement à la main le 13 août 1944 à Chahains ( un doigt écrasé) . Dans le journal de marche on peut lire « Le 13 août, le Régiment atteint Chahains, détruisant trois automoteurs, huit chars, capturant 150 prisonniers ». 

Le 12ème RCA participe à la Libération de Paris le 25 août 1944, puis c’est Vittel le 12/9, Dompaire le 13 : a conquis les 13 et 14 septembre la position DAMAS, résistant à deux violentes contre-attaques ennemies et détruisent 21 chars « Panther » au cours de 30 heures d’une lutte ininterrompue. A ainsi réalisé un des plus beaux faits d’Armes depuis le débarquement allié du 6 juin.

Du 15 septembre au 31 octobre, le régiment reste en position défensive, mission difficile et épuisante pour une unité blindée. L’artillerie ennemie, très active, lui occasionne des pertes sérieuses. Des accrochages de patrouilles ont lieu chaque jour. Le 1er Novembre Baccarat, Strasbourg le 23/11/44 puis les combats de la poche de Colmar jusqu’au 8 février 1945 à Fessenheim et Blodelsheim. C’est le dernier combat du Régiment dans cette Alsace où il laisse beaucoup des siens.

Adrien Morinaux ne participe pas à la libération de Paris mais il combat à Dompaire, Baccarat, Strasbourg et lors des combats de la poche de Colmar en tant que conducteur de chars.

La « chevauchée » d’Adrien avec le 12ème RCA et la 2ème DB d’août 1944 à février 1945 – carte klm127.

Le 8 avril, le Régiment est mis à la disposition du Détachement d’Armée de l’Atlantique. Il va apporter aux Forces Françaises de l’Ouest, luttant pour Royan, l’appui de ses chars et de leurs canons.

Le 22 avril, des éléments du 12e R.C.A. participent à la prise d’armes qui marque la fin des opérations sur le Front de l’Atlantique. Le 24, le Régiment quitte la région de Royan. Ses chars sont embarqués sur voie ferrée, ses véhicules à roues font mouvement par la route. Le 1er mai, il est regroupé à l’ouest d’Augsbourg, ayant franchi le Rhin et pénétré en Allemagne. Il y arrive trop tard pour prendre part aux derniers combats de la guerre, et y apprend l’Armistice.

 Adrien franchit la frontière franco-allemande le 29 avril 1945 et repasse la frontière germano-française le 27 mai 1945.

Le 22 juin 1945, à Fontainebleau, le général Leclerc fait ses adieux à la Division et c’est au cours de cette prise d’armes, qu’il remet à l’étendard du 12e R.C.A. sa deuxième palme :

« Régiment de Cavalerie d’élite qui, sous les ordres du lieutenant-colonel Minjonnet et du chef d’escadron Gribius, n’a cessé depuis le début de la Campagne de donner les preuves de sa magnifique tenue au feu. A pris une large part à la libération de Strasbourg par ses chars qui, en tête de la 2e D.B., ont traversé les Vosges, pris Saverne et son col, ouvrant la route aux Divisions Alliées. Pendant la période du 18 novembre 1944 au 16 février 1945, libère de nombreux villages de Lorraine et d’Alsace, battant, malgré de dures pertes, l’ennemi partout où il résistait, lui faisant 2.580 prisonniers, dont 2 généraux, lui détruisant 24 chars, 39 canons de différents calibres, de nombreuses mitrailleuses et plus de 200 véhicules automobiles ou hippomobiles. « 

Adrien Morinaux en tenue de sortie. On distingue parfaitement l’insigne de la 2ème DB et du 12ème RCA sur son col droit – col. famille Morinaux.

Il est titulaire de la Médaille commémorative française de la guerre 1939-1945 avec barrettes « ENGAGE VOLONTAIRE – AFRIQUE – LIBERATION – Allemagne » et de la Présidential Unit Citation décernée par le Géneral Eisenhower aux Libérateurs de Strasbourg.

Adrien est rayé définitivement des contrôles de l’Armée d’active le 11 septembre 1945 pour retourner à la vie civile.

La fiche de démobilisation d’Adrien – col. famille Morinaux.

 Après-guerre, chaudronnier de formation, il fait carrière dans la société Carrier comme soudeur puis chef de chantier.

Adrien avec ses lunettes de soudeur, fin des années 50 – col. famille Morinaux.

Il entre ensuite chez TUNZINI où il deviendra conducteur de travaux puis directeur de travaux avec 500 personnes sous sa responsabilité. L’activité de l’entreprise, chauffage et climatisation industrielle, s’oriente à partir des années 70 vers la protection incendie des bâtiments. Il crée pour Tunzini une usine de préfabrication de lignes de Sprinkler, à Ressons le Long dans la zone industrielle de Vic Sur Aisne dans l’Aisne où il habite à partir des années 1960.

Adrien est chef de chantier chez Tunzini au début années 60 – col. famille Morinaux.

Pour l’anecdote il embauchera chez Tunzini comme collaborateur le fils du Général de Rouvillois qui commandait le 12ème Cuir au sein de la 2ème DB et est l’un des premiers à entrer dans Strasbourg le 23 novembre 1944 (En milieu de matinée, il est devant la cathédrale et envoie au Général Leclerc le message devenu célèbre ‘’Tissu est dans iode’’ afin de l’informer que la 2e division blindée est dans Strasbourg).

Il se marie avec Madeleine Gérard, sœur d’un compagnon d’armes du RMT (Jacques Gérard) rencontré à Strasbourg alors qu’ils logeaient chez l’habitant. De cette union nait son fils ainé Bernard en 1947 (deux petites filles). L’union ne dure pas et le divorce survient rapidement.

En 1953 il épouse en secondes noces Geneviève Charpentier avec qui il aura une fille prénommée Marie-France en 1957 (5 petits enfants) et un fils Jean-François (deux petits enfants) en 1966. 

Lors d’un concours de danse avec Geneviève son épouse, à la fin des années 50 – coll. famille Morinaux.

Parmi ses petits enfants une des deux filles de Bernard habite actuellement Strasbourg.

Les deux petites filles (filles de Bernard) devant la Cathédrale de Strasbourg – coll. famille Morinaux.

Ils s’installent en Bretagne, à Port Navalo pour profiter d’une retraite méritée.

Il a fait beaucoup de recherches sur son frère décédé mais qui n’ont malheureusement pas abouti quand internet n’existait pas encore.

Il participe de nombreuses années aux réunions et commémorations des Anciens Combattants et c’est lors d’un voyage en Allemagne avec ses camarades de la 2ème DB, qu’il a pu conduire un char AMX30.

Adrien Morinaux en 1993 entouré de tous ses enfants et petits enfants (deux de plus sont nés après son décès). Ses enfants : Bernard tout en haut, Marie France en jaune à la droite de Bernard, Jean François chemise rose en bas à droite – coll. famille Morinaux.
 

Il décède à Nantes le 1er juillet 1994 à l’âge de 73 ans des suites d’une longue maladie.

Nous remercions très sincèrement Madame Marie-France MORINAUX-HARDEBOLLE, sa fille, ainsi que l’ensemble de sa famille pour le partage de son histoire familiale qui nous permet de rendre hommage à Adrien Morinaux et à tous ses camarades du 12ème RCA qui nous ont libéré du joug nazi et à qui nous devons nos libertés.

Affaires personnelles d’Adrien Morinaux – coll. famille Morinaux.
Gros plan des plaques militaires d’identification « dog tags » d’Adrien avec comme porte bonheur Notre Dame de Lourdes et de la Garde – coll. famille Morinaux.
Destins croisés…le périple d’Adrien et Pierre pendant la seconde guerre mondiale – carte klm127.

Pour découvrir l’Histoire se son frère Pierre : https://musee.turckheim-alsace.com/cartel/pierre-marie-morinaux-1920-1945/