Alexis KOPPREITTER 1926 – 1945

Alexis Koppreitter est né le 2 janvier 1926 à Pfetterhouse dans le Haut-Rhin (68).

Son père, Charles Koppreitter est né en 1891 en Alsace annexée (1871-1918) suite à la défaite française contre la Prusse. Il est cheminot à Pfetterhouse. Au début de la première guerre mondiale il est sergent dans la cavalerie du Kaiser. Il est blessé en 1914 par un éclat d’obus qui se loge dans sa colonne vertébrale. Toute sa vie restante Il va garder de graves séquelles.
Charles ne parle qu’alsacien et refuse de parler allemand (il ne sait pas parler vraiment en français) alors que son épouse parle parfaitement les deux langues et le dialecte.
Néanmoins il épouse Laure Gigandet (née en 1895) qui est une horlogère suisse. Ils ont deux fils : Marcel né en 1920 et Alexis en 1926. L’état de santé du père, Charles, se dégrade rapidement jusqu’à le rendre invalide à 100%. Son épouse, petit bout de femme de 1m53 va s’occuper courageusement de lui jusqu’à son décès en 1961. Elle le rejoint en 1963.
Le fils ainé, Marcel reçoit un prix de français en 1933 décerné par l’œuvre du prix français en Alsace, qui lui offre le livre « Nira, Australe mystérieuse de Eugène Thébault (sa fille le garde précieusement). Il rentre au collège de Matzenheim mais est atteint d’une tuberculose pulmonaire à l’âge de 14 ans, qui l’éloigne de sa famille et nécessite de nombreuses hospitalisations (Sanatoriums d’Aubure, des Trois-Epis et de l’Altenberg) jusqu’à la fin de la seconde guerre mondiale.

Lors d’une période de rémission et malgré son inaptitude physique Marcel doit effectuer le R.A.D. à la caserne de Neuf-Brisach comme secrétaire. Le colonel pour qui il doit travailler l’apprécie et ne l’oblige pas faire le salut hitlérien. Lors d’une altercation avec un jeune Lieutenant SS (Marcel n’avait pas salué) ce même officier s’interpose et lui évite de lourdes représailles. Il aidera également Alexis en le faisant sortir du Struthof alors qu’il est interné pour sabotage (nous n’avons pas davantage d’information à ce sujet).
Quant à Alexis il est au petit séminaire (il envisage de devenir prêtre) lorsqu’il doit aller travailler dans une usine d’armement (à Molsheim ou Schirmeck d’après sa nièce).
Il passe au conseil de révision comme tous les jeunes de son âge et est incorporé de force dans l’Armée allemande le 14 février 1944. C’est déjà terrible en soit mais pour ceux nés en 1926 c’est encore pire car ils sont pour la majorité d’entre eux affectés d’office dans la Waffen SS.
Habitant à proximité de la Suisse, Alexis envisage de franchir la frontière où sa mère a sa famille à Grenchen. Mais il ne le fera pas par peur des représailles auxquelles sa famille devra faire face automatiquement en raison de la « Sippenhaft » (loi du clan) mise en place par les nazis en Alsace annexée et qui rend responsable l’ensemble des membres d’une même famille des actes commis par les uns et les autres. En cas de non-présentation d’Alexis dans l’Armée allemande c’est la déportation pure et simple pour tous les membres de la famille. Ses parents et sa famille ne le savent pas encore mais ils ne reverront plus jamais Alexis.

D’après son Soldbuch (son livret militaire allemand) nous connaissons une partie de son parcours dans la Waffen SS jusqu’à son décès et que nous vous partageons ci-dessous :
Il est incorporé de force, à tout juste 18 ans, en Février 1944 dans la Division « Das Reich » ; au bataillon de formation de la division, (dans la 2.Kompanie du Feldersatzbataillon « Das Reich »).

Il est affecté quelques semaines après dans la 4.Kompanie du SS-Panzer Grenadier Regiment 3 « Deutschland ». Il semble y être au printemps 44 et est donc stationné en France (camp de Souge près de bordeaux) au premier semestre de 1944.
Il est transféré (probablement en Aout 1944) dans la 1. Kompanie du Sanitäts-Abteilung de la Division 9.SS « Hohenstaufen » « , pour se former et occuper un poste d’infirmier dans cette unité.

Nous ne savons pas s’il est en Normandie en juin/juillet 44, mais il est certain qu’il est au 1er Septembre 44 dans la Division « Hohenstaufen » et va certainement combattre au Pays-Bas à Arnhem lors de l’opération aéroportée Alliés « Market Garden » à partir du 17 Septembre 1944.
La division est ensuite retirée du front (après les combats d’Arnhem) début Octobre et part à l’arrière pour se reconstituer en Allemagne dans le secteur de Cologne. C’est pendant cette période que Koppreitter reçoit l’insigne de combat de l’infanterie, le Panzerkampfabzeichen Bronze suite, très certainement, aux combats en Hollande (p.30).
La « Hohenstaufen » reste sur Cologne jusqu’au déclenchement de l’offensive des Ardennes en décembre 1944.
Au début de l’offensive des Ardennes, la 9.SS est gardée en réserve, sur ses positions de départ près de Stadtkyll-Jünkerath. Alexis Koppreitter est hospitalisé le 1er jour de l’engagement de sa Division, le 17 décembre 1944, pour des problèmes musculaires. Du 17 au 22 Décembre 44, il est dans un hôpital militaire (le Kriegslazarett 2./612), puis dans un hôpital de réserve à Meiningen (Thuringe) pour le reste du mois de Décembre (p.20-21). Il en sort le 12 janvier 1945 avec une permission de convalescence (p.31) jusqu’au 22 Janvier 1945 à Dresde. Il ne participe pas aux combats des Ardennes.
Il paraît vraisemblable qu’il est transféré lors de la formation de la 32.SS Freiwillige-Grenadier-Division « 30. Januar » à cette unité (formée au Sud-Est de Berlin fin-Janvier/début-Février 45) après un passage dans son unité de dépôt au sortir de l’hôpital (SS-Sanitäts-Ersatz-Bataillon à Stettin, en Poméranie). La division est immédiatement engagée et étrillée par l’offensive soviétique sur l’Oder au Sud de Frankfort sur l’Oder.
Il est porté disparu après le 26 avril 1945 près de Königs Wusterhausen, lors des violents combats au Sud-Sud-Est de Berlin.
Alexis Koppreitter disparaît 3 mois après avoir « fêté » ses 19 ans…

Sa nièce Ines nous raconte qu’après-guerre des incorporés de force alsaciens ayant servis avec Alexis ont rendus visite à ses parents pour leur dire combien leur fils était un homme bon, droit, respectueux et humain. Certains ont raconté (dont un Belfortain avec lequel Alexis s’était lié d’amitié) qu’il était brancardier et il a été ensuite envoyé au front dans une section disciplinaire car il a refusé de porter une arme…il aurait été exécuté par ses propres chefs pour ce même motif…?

C’est par le courrier du 2 avril 1949, que le Commandement en chef français en Allemagne qui se trouve à Berlin, informe le Maire de Pfetterhouse qu’Alexis Koppreitter est décédé et le pris d’en informer sa famille.

Quelques affaires personnelles ont été renvoyées à sa famille comme une portefeuille, quelques pièces de monnaie allemande et ce petit médaillon porte bonheur de la vierge Marie pour obtenir sa protection; mais aussi à son revers, écrit en toute petite lettre le mot « FRANCE », la Patrie chérie d’Alexis qu’il n’a jamais oublié et qu’il portait sur lui malgré l’obligation qu’il avait de porter cet uniforme qu’il n’avait pas choisi.

Son frère Marcel a élevé ses enfants (Alexia née en 1946 prénommée ainsi en hommage à son oncle disparu et Inès née en 1951) dans la non-violence, la droiture, la bienveillance, le respect des humains, des animaux, de la nature, des institutions et a « obligé » ses filles à apprendre l’allemand en première langue car étant voisins il disait que c’est à la nouvelle génération de construire l’Europe pour qu’une nouvelle guerre ne se reproduise jamais. Il décède en 1988, 1 an avant la chute du mur et la réunification de l’Allemagne, et n’aura donc jamais eu l’occasion de se rendre personnellement sur la tombe de son très cher frère cadet Alexis.

Le dimanche 21 juillet 2025, Inès Koppreitter épouse Wartel, fille de Marcel et nièce d’Alexis s’est rendue avec son mari ainsi qu’une amie d’enfance à Berlin, dans le cimetière boisé d’Halbe, pour se recueillir dans le carré 10 où les rangées 17 et 18 accueillent les dépouilles de travailleurs forcés, d’objecteurs de conscience et de déserteurs allemands réfractaires au nazisme, exécutés par leur hiérarchie. Sur un nombre considérable de tombes est inscrit la mention « unbekante avril 1945 »…inconnu 1945…où se trouve possiblement également Alexis en l’absence d’une tombe individuelle.

Par ce voyage mémoriel elle a exhaussé le vœu de Marcel et a déposé symboliquement un petit bouquet bleu, blanc, rouge non loin du lieu où repose très certainement Alexis depuis 1945.

Nous remercions très sincèrement Inès et Alexia Koppreitter pour le partage de leur histoire familiale et la donation des affaires personnelles d’Alexis afin que nous puissions raconter au plus grand nombre sa tragique histoire et celle de tous nos incorporés de force alsaciens et mosellans victimes de la barbarie nazie.
